Lorsque Philippe Pasqua nous avait reçus chez lui au Portugal il y a quelques mois, il avait évoqué sa future exposition, Borderline, qui sera présentée au Musée Océanographique de Monaco de mars 2017 à janvier 2018.
Une expo « énormissime » !
Il y a quelque temps, nous sommes allés lui rendre visite dans son atelier parisien. C’était l’occasion pour nous d’en savoir plus sur cette grande et forte expo qui promet d’être « énormissime », comme il dit.
Depuis plusieurs années, Le Musée Océanographique de Monaco offre la possibilité à de grands artistes contemporains d’investir les lieux et de mettre leur art au service de la protection des océans. Se sont déjà attelés au projet Damien Hirst en 2010, Mark Dion en 2011, Marc Quinn en 2012, ou encore Huang Yong Ping de 2010 à 2013.
L’écologie comme fil conducteur
C’est maintenant le tour de Philippe Pasqua qui, sensible à la cause, a donc présenté il y a plus d’un an son projet pour le lieu. On connaît surtout l’artiste pour ses portraits monumentaux, ses sculptures de crânes et son côté provoc’.
L’exposition Borderline est donc l’occasion pour lui de travailler d’une manière très différente et de créer des oeuvres qu’il n’aurait sans doute jamais réalisées sans cela, le thème étant tout nouveau pour lui. Et même si certaines pièces n’auront rien à voir avec la mer, le lien avec l’écologie sera le fil conducteur de l’exposition.
Nous avons eu la chance de voir l’ébauche d’une des sculptures. C’est une vague de méduses qui fera 2 m 50 de diamètre, une œuvre de verre et d’aluminium faite de filaments enchevêtrés et de chapeaux superposés dans lesquels se reflètent le décor et le spectateur.
Le Champ/Chant des Méduses est encore inachevé mais déjà il étonne par le contraste entre l’aspect massif des matériaux employés et la légèreté qui s’en dégage. Philippe Pasqua sculpte la transparence et trouble notre perception en jouant à la fois sur la pesanteur et l’évanescence, la beauté et le danger…
D’autres pièces majeures sont également prévues : un olivier aux feuilles minutieusement sculptées, un tyrex, des crânes… et de plus petites, des tableaux, vont les rejoindre, mais rien n’est encore définitivement fixé : « Je vais voir avec le temps comment je vais composer autour des grosses pièces. »
« On peut faire une belle expo sans provoquer »
Cependant on regrette que deux œuvres qu’on avait vues dans sa maison du Portugal et qu’il comptait intégrer à l’exposition ne soient pas présentées. Une réinterprétation de la Cène (une table autour de laquelle sont installées des gargouilles au corps de singe et à tête de clown), et deux gigantesques rhinocéros en position scabreuse.
« C’est trop provoc’ pour eux. Ils ne veulent pas de sexe ni de religion. (…) Dommage. » Mais il ne se sent pas frustré pour autant et comprend le choix du musée, surtout quant aux rhinos : « Il y a les enfants, c’est déjà peut-être trop direct comme image. (…) On peut faire une belle expo sans provoquer. »
Le travail réalisé pour le Musée Océanographique coûte évidemment quelques contraintes. Celle des matériaux en est une autre. L’aluminium s’est imposé car le bronze, qu’il a l’habitude d’utiliser, aurait été bien trop lourd. Pour autant, les matériaux n’ont pas été choisis en fonction du décor. Seuls certains sujets sont créés pour le Musée même. C’est d’ailleurs en visitant le lieu que les idées lui sont venues.
Inévitablement, ce projet va aussi ouvrir à l’artiste de nouvelles orientations, de nouvelles idées de créations. Lorsqu’on lui demande s’il va maintenant s’orienter davantage vers ce type de sujets, il répond : « Je continue, je ne sais pas. Là je suis en train d’imaginer un casque de samouraï avec du verre. (…) Chaque jour il y a des nouvelles idées. On ne peut pas savoir à l’avance ce qu’on va faire. C’est des idées qui viennent comme ça, au fur et à mesure. J’ai une ligne, mais elle est large. C’est vaste. Je ne me cantonne pas à un truc. Chaque idée, si elle est bonne, je la fais. »
Si ce n’est pas la première fois que Philippe Pasqua met son art au service d’une cause, c’est pour lui une première de créer dans ce but précis. Lorsque des organismes le sollicitent pour des ventes de charité (Sidaction, les enfants handicapés ou le cancer), il a l’habitude de faire don d’une œuvre, sans rapport avec le sujet.
Après le Rocher, la Chine
L’exposition au Musée Océanographique de Monaco n’est que le début de l’aventure pour ces toutes nouvelles œuvres. Après le Rocher, elle partira en Chine, et là, Philippe Pasqua pourra réintégrer la sculpture des rhinos, « c’est sûr, ils l’adorent ! » Peut-être aussi la table avec les singes. C’est donc une expo qui n’est pas destinée à rester figée. L’artiste envisage de la faire évoluer en y ajoutant des pièces et pourquoi pas, d’exposer un jour la table dans une église, « ce serait génial ! ».
« On ne peut pas se louper dans une expo comme ça »
Sans nul doute, Borderline sera formidable. Ce sera d’ailleurs la plus grande exposition de Philippe Pasqua. Tant sur la durée que sur la quantité des œuvres présentées. « Ce sont des choses qui n’existent même pas. C’est tout nouveau. Les gens vont voir des choses qu’ils ne connaissent pas du tout. Ils connaissent plus la peinture et les crânes. » Elle permettra à ceux qui ne le connaissent pas encore de découvrir le talent de cet artiste qu’on adore et aux autres d’en avoir une toute nouvelle approche.
Ce sera aussi l’occasion pour Philippe Pasqua d’asseoir une notoriété toujours plus grandissante. Et ce sera amplement mérité. « On ne peut pas se louper dans une expo comme ça, il faut faire que des grosses choses. » Tout sera à la vente après l’expo. Certaines pièces sont d’ailleurs déjà réservées.
On aurait aimé vous parler de tous ses autres projets car il fourmille d’idées, Philippe Pasqua, et il en parle volontiers, avec enthousiasme, nous montrant ses créations en cours, ses œuvres inédites, nous racontant ses rencontres avec ses modèles… Mais on a promis de ne rien dire pour le moment. C’est sûr, ça ne restera pas secret très longtemps.
M.K.
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